lundi 26 novembre 2012

Les triplets Parent pendant l’épidémie de 1703

En 1702 et 1703, une épidémie de variole (la picote) ravage la Nouvelle-France. Le fléau décime la population comme l’indique le nombre de sépultures dans les registres paroissiaux. Les statistiques le démontrent; l’épidémie frappe durement Beauport.

Les triplets Parent – Étienne, Jean et Joseph – affectés par le décès de deux de leurs enfants, cherchent à combattre la maladie. En effet, Jean Parent et son épouse, Marie-Françoise Bélanger, perdent leur fils Simon le 16 février 1703 et, Étienne et Marie-Thérèse Chevalier, un fils prénommé lui aussi Étienne, quatre jours plus tard. 


Se sont-ils isolés ? Il faut le comprendre ainsi lorsque, le 21 août 1703, Robert Voyer s’adresse au tribunal de la prévôté de Québec. Le 3 août précédent, Voyer avait obtenu un jugement de la cour en sa faveur contre les triplets Parent et il veut faire exécuter la sentence. Voyer demande à Jean Parent de lui payer une somme de 51 livres et 10 sols pour du vin et de l’eau-de-vie « quil luy a fourny pandant la maladie de la picotte ». Pour Joseph, cette somme se monte à 35 livres et 19 sols, toujours pour du vin et de l’eau-de-vie qu'il a lui procuré pour la même période et Étienne, pour les mêmes raisons, doit payer une somme de 17 livres et 14 sols (1). 


Robert Voyer connaît bien la famille Parent. Pendant plusieurs années, il fut le locataire de leur moitié de la maison de la rue Sault-au-Matelot, en la Basse-Ville de Québec. Les triplets Parent avaient-ils inventé une décoction composée de vin et d’eau-de-vie pour combattre l’épidémie de picote ? En tous les cas, ils n’eurent pas à pleurer d’autres morts.

(1) BAnQ. La prévôté de Québec (registres civils), vol. 41, folio 51r.

lundi 19 novembre 2012

Michel Parent : Le prix de la calomnie

À toutes les périodes de notre histoire, les rumeurs et les potins ont fait partie du quotidien de nos ancêtres. Si la plupart du temps, ces mots de trop ou ces paroles blessantes portent rarement  à conséquence, il existe des cas où la personne visée par ces attaques verbales exige réparation. C’est cette situation que vivent Michel Parent et son épouse, Jeanne Chevalier. Michel Parent est le fils de Pierre Parent et de Jeanne Badeau. Le 24 novembre 1692, il épouse Jeanne Chevalier, fille de René Chevalier et de Jeanne Langlois. Michel Parent travaille comme charpentier de navire et comme cultivateur à Beauport. La vie de la famille Parent-Chevalier se déroule normalement; les enfants naissent régulièrement. Au début de 1700, Jeanne a déjà accouché à quatre occasions.

Cette vie sereine connaît des heurts en cette année 1700. Le 24 février, Michel Parent, accompagné de son épouse, doit se présenter chez le notaire Chambalon à la demande de Jean Larchevesque dit Grandpré. Ce dernier accuse Michel et Jeanne d’avoir injustement calomnié sa nièce Catherine Larchevesque en racontant que cette dernière aurait eu un enfant hors mariage quelques années auparavant. Il a entrepris de les poursuivre en justice. L’oncle prend la défense de la nièce car le père de Catherine est décédé l’année précédente. Il faut protéger la réputation de la jeune fille car elle doit se marier au cours de l’été prochain. Une jeune fille ne peut se présenter devant l’autel quand une telle rumeur entache sa réputation. Quelles peuvent être les raisons qui ont poussé Michel et Jeanne à agir ainsi ? Les familles Parent et Larchevesque sont-elles en conflit ? Ils n’apprécient pas l’idée que Catherine Larchevesque épousera, à l’été, Jean Badeau, veuf depuis très peu de temps ? La première épouse de Jean Badeau, Françoise Roy, n’est décédée que depuis 11 mois; elle a été inhumée le 20 août 1699. Rappelons que Jean Badeau est le cousin de Michel Parent et lui aussi travaille comme charpentier de navires. Bref, on ne peut que spéculer sur les circonstances qui ont amené une telle poursuite.

Michel et Jeanne doivent admettre leurs torts. Pour couper court à cette action, Michel se rend chez le notaire Chambalon qui écrit que ce dernier

Reconnoist que véritablement Luy et sa femme ont dit que ladte Catherine Larchevesque avait eu un enfant, mais quils ne L'ont dit que parce quils l'ont ouy dire; que la Vérité neantmoins Est quil N'en connoissoit point les consequences et que mal apropos ils l'ont dit et déclaré a plusieurs personnes sans faire reflection Sy cette Calomnie Luy pouvait faire tout au nom; et que C'est plus par Ignorance que par malice; pour raison de quoy Luy parant tant pour Luy que pour Jeanne chevallier safemme avoue que mal a propos et sans raison Ils ont dit Et semé ladte calomnie contre et reputation de ladte Larchevesque quil reconnoist pour une tres honneste fille et N'avoir Jamais Connu la faute dont il La vainement accusée et Luy en demande pardon Et En Consequence promet et s'oblige ledt parant payer audt Larchevesque ce acceptant la Somme de dix neuf livres pour tous les fraits de ladte faite jusque au Jour dans la feste de Saint Jean baptist proschaine.

Michel et Jeanne se reconnaissent d’avoir colporté une rumeur et parlé sans discernement et, de ce fait, avoir porté atteinte à la réputation d’une jeune fille. Ils doivent donc s’excuser et payer un montant de 19 livres en dommages au plaignant.

lundi 12 novembre 2012

Les actes de sépultures des triplets Parent

À deux mois d’intervalle, Jean Parent et Joseph Parent rendent l’âme. Tout d’abord, Joseph, sérieusement malade, est admis à l’hôpital de l’Hôtel-Dieu de Québec le 29 décembre 1726 et il n’en ressortira pas vivant. Il meurt le 2 février et est porté en terre le lendemain dans le cimetière des pauvres. Les registres de l’Hôtel-Dieu indiquent qu’il a 53 ans. Il aurait plutôt 52 ans.

Extrait des registres de L’Hôtel-Dieu de Québec

« Joseph Parent natif de Beauport est entré malade a lhôtel Dieu de Quebec le 29e de decembre de l année 1726 et y esy decédé le 2e de fevrier 1727 agé de 53 ans, muni des derniers sacrements. il fut enterré le lendemain dans le cimetière des pauvres. »

Un mois et demi après le décès de Joseph, Jean est aussi hospitalisé à l’Hôtel-Dieu. Entré à l’hôpital le 18 mars, il meurt le 1er avril. L’acte de sépulture indique aussi que Jean est âgé de 53 ans. Lui aussi aurait plutôt 52 ans. Les autorités l’enterrent le jour même dans le cimetière des pauvres pour cause de maladie contagieuse. On ne connaît pas la nature de la maladie qui a entraîné la mort de Jean Parent car en 1727, la Nouvelle-France n’est pas confrontée à un épisode épidémique qui aurait causé la mort de nombreux habitants.


Extrait des registres de L’Hôtel-Dieu de Québec

 « Jean Parent natif de beauport est entré malade en cet hotel Dieu le 18e jour de mars 1727 et y est décédé le 1er d’avril de la même année agé de 53 ans, muni des derniers sacrements, il fut enterré le même jour a cause de sa maladie contagieuse dans le cimetière des pauvres. »

Le troisième triplet va vivre près encore près de 30 ans. Les dernières années d’Étienne se déroulent sereinement, sans heurts. Il vit parmi les siens, entourés de ses nombreux enfants et petits-enfants, qui pour la plupart résident dans la région de Beauport. Ses derniers jours s’écoulent paisiblement. Étienne Parent, le survivant des triplets de Beauport, rend l’âme le 22 août 1756, à Beauport. Il est âgé de 81 ans. Comme c’est souvent le cas, l’acte de sépulture le vieillit de quelques années.

Extrait des registres paroissiaux de la paroisse La Nativité-de-Notre-Dame, à Beauport

« Le vingt troisiesme jour d’AouSt mil sept cent cinquante six par nous Soussigné prestre a Eté jnhumé dans le cimetiere de cette paroisse le corps d’Etienne parent décédé Le jour précedent muny des Sacremens de penitence, viatique Et Extreme onction agé d’Environ quatre vingt cinq ans presens a Lade jnhumation Nicolas parent Son fils et Louis Langevin Son neveu qui ont declaré ne Scavoir Signer de ce requis Suivant l’ordonnance Chardon prtre »

lundi 5 novembre 2012

Les actes de mariages des triplets Parent

Les triplets Parent se sont tous mariés le même jour à Beauport. Voici leurs actes de mariages

Extrait des registres de la paroisse La Nativité-de-Notre-Dame, à Beauport
Le …… Février L’an mil six cent……….. après la publication de ban requises et fiancailles faites en face d’Église s’étant presenté aucun empechement, j’ay conjoint en mariage Etienne Parent fils de Pierre Parent et de Jeanne Badeau de cette paroisse de Beauport d’une part et Marie Thereze Chevallier fille des defunts René Chevallier et Jeanne L’Anglois du dit lieu d’autre part L’Epoux agé d’environ vingt deux ans & la ditte epouse de vint et un
Plus
Le dit jour Jean Parent fils des susdits Pierre et Jeanne du meme age et gemeau avec le dit Etienne son frere d’une part a été conjoint par moy en mariage avec Marie Françoise Bellanger fille de defunt Nicolas Beallanger et de Marie de Rainville du dit lieu d’autre part agée d’environ seize ans, plus le dit jour.
Joseph Parent troisieme frere jumeau des deux susdits d’une part et Marie Bellanger seur de la susditte Marie Françoise et fille des dits Nicolas Bellanger et Marie de Rainville d’autre part agée d’environ dix huit ans presents aux susdits mariages messire Jean Bochart chevalier seigneur De Champigny Intendant pour le Roy en la Nouvelle France. Le dit Pierre Parent pere Joseph Rancour habitant & Noel vachon aussi habitant du dit lieu. Les dits Etienne et Jean Parent avec les trois susdittes epouses et parent le Pere declaré ne scavoir signer de ce enquis suivant l’ordonnance.
Joseph Parant        Bochart Champigny
N Vachon
                Boullard

Il ne faut pas être surpris que les épouses des triplets donnent naissance à leur premier enfant à quelques jours d’intervalle. Tout d’abord, Marie-Françoise Bélanger donne naissance à un garçon le 8 décembre. Il est amené sur les fonts baptismaux de l’église de Beauport le lendemain; on lui donne le prénom de Jean. Nicolas Bélanger fils, frère de la mère, et Marie-Françoise Vachon acceptent d’être les parrain et marraine. Cet enfant ne vivra même pas un mois car il décède le 2 janvier suivant. Marie-Thérèse Chevalier accouche d’un garçon le 10 décembre. On le baptisera du nom d’Étienne six jours plus tard à l’église de Beauport. Son parrain est Pierre Vachon dit des Fourchettes et sa marraine, sa tante, Louise Chevalier, épouse de Jacques Parent. Enfin, le 17 décembre, Marie Bélanger donne la vie à une fille qu’on amène à l’église de Beauport le jour même pour recevoir le baptême sous le nom de Marie-Thérèse. Le parrain est Pierre Bélanger, frère de la mère, et la marraine, Marie-Thérèse Toupin.