vendredi 9 mars 2012

Jeanne Badeau veille sur la réputation de sa famille

Tout au long de sa vie, Jeanne Badeau s’est impliquée activement dans les affaires de la famille. Malgré son âge avancé, notre ancêtre demeure toujours vigilante et veille de près aux intérêts de la famille, surtout si la réputation des siens est en cause. En 1705, âgée de plus de 65 ans, elle croit qu’il est de son devoir d’intervenir lorsqu’elle apprend que son petit-fils André Corbin souhaite épouser Charlotte Rainville. Le 28 novembre, elle s’adresse au tribunal de la prévôté de Québec. Elle souhaite que le juge de ce tribunal interdise à son petit-fils d’épouser la dame Rainville. Mais pourquoi ? La raison en est bien simple. Charlotte Rainville a déjà eu un enfant hors des liens du mariage et Jeanne juge cette conduite scandaleuse. Pour appuyer sa démarche, Jeanne dépose devant la prévôté de Québec le mandat d’opposition à ce mariage de son fils Jacques Parent, tuteur du jeune Corbin, qui la soutient dans cette action. Jacques Parent ne peut être présent à l’audition de cette opposition étant en voyage à Montréal.

André Corbin est le fils de David Corbin et de Marie Parent et Charlotte Rainville est la fille de Jean Rainville et d’Élisabeth de Laguaripière. Cette dernière est la deuxième épouse de Jean Rainville; celui-ci, en premières noces, avait uni sa destinée à Suzanne Badeau, la jeune sœur de Jeanne.

Devant le juge de la prévôté, Élisabeth de Laguéripière prend la défense de sa fille. Elle demande qu’on fasse preuve d’indulgence. Il est vrai que sa fille a déjà eu un enfant sans être mariée mais elle souligne que sa fille ne constitue pas un cas unique, d’autres jeunes filles ont vécu la même situation. Elle estime que sa fille s’est beaucoup assagie depuis et que si son désir est d’épouser André Corbin, qu’elle devrait pouvoir le faire, sans obstruction aucune.

Le juge tranche : André Corbin et Charlotte Rainville ne peuvent se marier et il leur ordonne de cesser de se fréquenter tant et aussi longtemps qu’une assemblée de famille ne sera pas tenue pour discuter de leur cas. Si ces directives ne sont pas respectées par les protagonistes, ils seront condamnés à 25 livres d’amende. De plus, le juge avertit la mère de Charlotte que celle-ci ne peut recevoir André Corbin dans sa maison sous peine d’une amende de 20 livres et, s’il y a récidive, d’une amende de 50 livres.

Mais le cœur a ses raisons et il fait fi des lois. Finalement, André Corbin et Charlotte Rainville sont autorisés à se marier. Le 26 janvier 1706, le curé de Québec bénit leur union. L’acte de mariage fournit d’importantes informations sur ce mariage. Le curé écrit qu’il obéit à une directive de l’intendant de la Nouvelle-France puisque « voyant la longue perseverance du garçon qui n’a pu quelque rayson qu’on luy ait pu dire estre detourné nous prie de paSer oultre ce qui nous a obligé de celebrer le mariage ».

Pourtant, Jeanne Badeau a bataillé jusqu’au dernier moment pour empêcher ce mariage. Même après avoir discuté trois heures avec elle le dimanche le 17, le curé Dupré qui croyait bien obtenir sa bénédiction, chose qu’elle lui avait promise devant trois de ses enfants, reçoit plutôt son opposition. Le mariage a du être reporté dans l’attente de l’autorisation de l’intendant Raudot qui la signe le 24 janvier. Dans cette ordonnance, l’intendant écrit qu’il permet au curé de Beauport de ne pas tenir compte de l’opposition émise par Jeanne Badeau et de célébrer le mariage d’André Corbin avec Charlotte Rainville.

En plus de l’enfant né avant son mariage, Charlotte Rainville a donné naissance à onze enfants.

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